Mon âme s’en va, sans chaleur, sans laine,
Fuyant sans aile, nue sur le sol dur,
Ce matin lent où la fraicheur promène,
Ses parfums doux renouvelés d’azur.
Etalant une joie qui courbe encore,
Sous des cieux laiteux qui la multiplie,
Le jonc d’un rêve ou deux que recolorent
L’aube nouvelle et l’oiseau qui l’emplit,
Au creux des champs qu’un nuage contourne,
Sur des blancheurs énamourées d’hiver,
L’âme m’échappe et glacée se retourne,
Vers les brasiers disparus de mes terres…
Ici les charbons ardents font des cendres,
Rien ne crépite où rougeoyaient aux âtres
Les morceaux de bois morts, nos heures tendres,
En moi je suis un troupeau sans son pâtre…
Sempiternelle attente, irréductible
Sursis, survivre au jour comme en l’espace
Tourne, empruntant ses allées invisibles,
L’astre craignant d’immenses feux de glace !
Désempli trop tôt de ce que j’étais,
Semblable aux vidés chapons de Noël,
Je suis soudain ce qu’on me promettait,
Pourtant la farce a des parfums d’airelles…
On me voit mourir sans ma flamme, étrange,
Privé de Dieu, vivant, gavé du pire,
Je suis un corps attendant qu’on le mange,
La chair en moi loue ce dernier plaisir…
Je vais assassiné au temps limpide,
Mais, souvenir reniant le passé,
Maudit, j’erre en moi stérile et gravide,
Désenfantant les instants trépassés.
Que naitrait-il, alors qu’ont disparu
La poésie et la muse magiques,
Quoi ! Des feuilles privées d’arbres, écrues,
Que fuirait même une neige euphorique ?
Rien. Il ne peut rien rester de mes heures.
Comme un oiseau s’effraie de ses murmures,
L'âme envolée, sa défunte chaleur
Semble avoir asséché mon rêve pur…
Pour renaître, qui faut-il que j’implore,
Dites-moi où prier, crier pardon,
Vers quel dieu, quel archange, quel encore ?
Rouvrez ce ciel où l’on me verrait bon…
Sébastien Broucke
30 & 31 décembre 2012