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13 mai 2011 5 13 /05 /mai /2011 14:00

 

Paradis.jpg

 

Heureux ! Sauras-tu l’être ! Heureux, sauras-tu bien !

Laisser tomber au sol le fardeau des aigreurs,

Goûter plus d’un instant l’incorrecte langueur,

...Usurper dans ton sang tes vices pour les miens !

 

 

Heureux, telle une femme avant l’événement !

Courir en désirant que cesse enfin ta fuite,

Et, dedans cette peur appréhendant la suite,

Te détendre dans l’ombre, amusé, plaisantant !

 

 

T’habiller de candeur aux orages d’un schisme,

T’embourber dans des cieux d’un autre œil éclairés ;

Manger, sans tes couverts ni la table dressée,

Toi vieillard éphémère, au banquet du gâtisme !

 

 

Il est à peine l'heure, et déjà tout s’éveille,

Le fond de l’air est frais, si vive la corneille ;

Rapporte vers le soir ce que tu eus trop peu,

Tu verras mollement ta nuit devenir bleue.

 

 

Tes astres déchiffrés ou bien manquant de place,

Sans un bruit pousseront les murs de tes espaces ;

Imprévisible, enfin, comme ces nés nouveaux,

Le soir te descendra comme une aile d’oiseau,

 

 

Brusquant en flot ta barque, en ondes vaporeuses,

Toi qui n’étais qu’en toi qu’heures tumultueuses...

Que ton cœur libre enfin s’apaise en y pensant !

Elance-toi, vas, meurs, souris au trépassant,

 

 

Au bord du dernier rêve, apaisante nuée,

Dévoile moi ton âme aux hommes embuée !

Comme la veuve un jour ose fuir son couvent,

Ne reste pas longtemps à genoux et mourant !

 

 

Dans l’Eden obombré transpire autant que l’âtre,

Berce toi de soleils, de miel, de gais rayons,

Revêts toi de ta peau, brûle aux feux tes haillons,

Offrant au noir du ciel leurs nuages bleuâtres.

 

 

Vois soudain ce qu’emporte au firmament des cieux

La jeunesse qui luit en ces miroirs trop vieux.

Repensant à l’été, mangeant tes raisins secs,

Repose alors ton livre en sa bibliothèque.

 

 

Baise, baise ta voile à ce souffle enflammé

Que te donne la braise aux clartés murmurées ;

Fais resplendir ainsi qu'un banc que l’onde noie

Tous ces jours où poisson jamais tu ne nageas.

 

 

Mais, quel désir de vivre et d’en être affamé,

Malheur ! sommeille au fond de nos petites fois !

Et pour dernier repas, ô frère ! Quel dieu ploie

Cet arbre où trône un fruit qu’on s’effraie d'affleurer...

 

Sébastien Broucke

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10 avril 2011 7 10 /04 /avril /2011 12:30

 

S-arrime-en-fin.jpg

 

Merci d'avoir été pour un an la maîtresse

des plus belles pensées transhumant dans mon cœur.

J'ai passé une année aux sommets lents d'une île,

que le ciel de vos yeux estoqua de lueurs ;

Chaque soir j'attendais le matin lendemain

pour croiser cette épée lacérant les brouillards,

mais un jour, je l'avoue, un jour dedans mon torse,

cette dague de fer me vida de mes forces !

 

Oublierai-je jamais cette seconde intense,

peinte de douleur bleue, plainte muette, étrange,

cet éternel instant suspendu sur mon cou,

où morte en adorant l'ange exterminateur,

ma flamme va, vacille, oscille, vient tomber,

écrasant en bouquets sa faiblesse à vos pieds ?...

Rêvant de vos regards comme une bête aux eaux,

me voulant le berger, je devins vôtre, agneau.

 

Dans ce matin lointain, halo fantomatique,

votre œil s'était planté plus avant que j'aimais.

Avec ce qu'elle était, marrie, et dans un souffle,

mon âme avait rendu soudain sa liberté.

J'avais cinq ans sans doute, un présent éternel,

lire, écrire, être grand, viendrait l'année prochaine...

J'étais comme mon fils, l'immense était devant,

et mes vers auraient outré bien des braves gens.

 

En bénissant la vie d'être en vous merveilleuse,

je marchais solitaire en un monde inconnu.

L'ivresse me berçait à l'ombre des silences

que nous partagions comme un fruit défendu.

Quelquefois quelques mots qui n'avaient aucun sens

tombaient comme des vagues, au bord de nous deux.

Nul ne lira jamais ce qu'en vous j'ai vécu,

Et je garde au secret l'interdit, l'inconnu...

 

J'aimais votre présence éphémère et brûlante,

et parfois je voyais jusque dans votre ventre...

Je voyais, le crois-tu, infidèle et coupable,

un frère imaginaire à l'enfant que j'aimais,

que je portais vers toi chaque jour au portail,

et que m'ôtait des bras ton sourire à neuf heures.

J'étais fou, réjoui, étonné, amoureux,

Ah ! saviez-vous au moins combien j'étais heureux ?...

 

Oui, vous avez été la plus douce lumière,

le charme et la bonté, de douceur habillés,

et si le fils venu n'est pas encor le frère,

merci d'avoir donné ce qui ne pouvait qu'être.

Je pourrais dire plus, je voudrais dire mieux,

mais je laisse ces mots, sincères, malhabiles,

passer sur votre cœur comme un vol d'oiseaux bleus,

pendant que mes mains vont, tremblant, dans ses cheveux...

 

 

Sébastien Broucke

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28 février 2011 1 28 /02 /février /2011 16:00

 

L-homme-et-l-ange.jpg

 

Peinture de Tomasz Rut

 

 

Que de souffrance au fond de moi,

Des cris aux cales du bateau,

Le cœur dévoré de tempêtes,

Mon souffle à chaque instant s'arrête.

Sur le pont mon âme titube,

Plus aucun de mes pas n'est sûr,

Car dans cette nuit sans lanterne,

Je suis navire sans gouverne.

Sans toi je ne suis rien du tout,

Pas même un mousse, un homme à l'eau,

Rien qu'une peur d'eux dans mes yeux,

Un homme vide sous les cieux,

Comme un peu ivre et mal en mer,

Loin de moi-même et loin de tout,

Une mouette sans bateau,

Un poisson noyé dans son eau.

De tout pourtant je me souviens,

Mais comme un homme, ange amnésique,

J'ai perdu l'étoile et le port,

Mon corps étranger à ton corps.

Ai-je un chemin, ai-je une adresse,

Ai-je un chez-nous, une famille,

Si tu n'es plus, dis-moi, qui suis-je ?

Et si tu pars, tout seul, que puis-je ?

Encore un peu me lamenter,

Juste aujourd'hui me souvenir,

Je croyais savoir qui j'étais,

Vivre c'était… quand tu vivais.

Tous les radeaux s'échouent un jour,

Sur des rochers ou sur du sable,

Mais quoique dure mon voyage,

Je suis bouteille sans message.

O ma petite, O mon grand cœur,

O toi mon astre de tendresse,

J'aimerais relever la tête,

Garder encor mon âme en fête...

Mais ta main sans vie dans la mienne,

Ne chante que mensonge et peine,

Effrois, débris et souvenirs,

Des années mortes à venir.

Ce soir, Grand Dieu, Qui que Tu sois,

Je Te condamne à exister,

Car sans Toi je ne pourrai pas

Remettre des fleurs sous ses pas !

Ce soir moi qui n'ai plus le choix,

Je T'impose de m'expliquer,

Ces secrets où je ne suis pas,

Ce ciel où Tu caches sa voix.

Elle était pour veiller sur moi,

J'étais né pour la protéger,

L'absence oblige à croire en Toi...

Mais je ne comprends toujours pas !

Planté comme un héros bien droit,

Trop petit pour Te menacer,

Mon âme pourtant n'oublie pas,

Que c'est ton souffle en moi qui bat.

La mort et l'amour sont tes droits,

Mais même indigne et enchaîné,

Le peuple est la raison d'un roi,

Entends-Tu sa voix dans ma voix ?!

Menteur, infâme et hors ta loi,

Tu sais seul pourquoi je suis né,

Quand nous nous aimions elle et moi,

Dans nos cœurs ne vivais-tu pas ?

Comme tant d'autres avant moi,

Je laisse mes larmes couler,

Et comme eux ne m’expliquant pas

Ma folie s'attache à ma foi....

Aucun n'est juste devant Toi,

Mais Toi le Dieu qui nous as fait,

Toi que l'homme en lui ne veut pas,

Dis-moi, veux-Tu de l'homme, Toi ?!

Je T'aime et Te hais à la fois,

Mais bien conscient de T'offenser,

Dis, Grand Dieu, pour l'amour de Toi,

Nous défendras-Tu contre Toi ?

Car quand l’univers fait naufrage,

Quel homme aurait assez d’amour,

Pour ordonner que la mer mène

Un paquebot sans capitaine ?

 

Sébastien BROUCKE

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27 novembre 2010 6 27 /11 /novembre /2010 21:00

 

LFAT.jpg

 

on ne voit déjà plus que je ne suis plus là,

on ne voit même plus qu'on ne voyait que moi.

 

 

nuit et jour debout sans sommeil,

au ciel toujours les bras levés,

à boire aux pluies et au soleil,

j'avais vu couler tant d’années.

mais coupable d'avoir été,

vers les nuages, les oiseaux,

les donjons blancs, les vérités,

qu'érigeaient des palais plus beaux,

j'ai vu crucifié sur le sol

le poids tenace du silence,

et sur l'argile aux mottes molles,

couchées les flèches de mes lances...

 

Ils allaient nus, chétifs, aphones,

quand moi déjà j’étais si haut,

tous les aïeux des bûcheronnes

qui m'ont fait tomber le manteau !

c’était hier que s’écroulait

ce souvenir et c'est déjà,

sans autre éclat sur le passé,

que mon éternité s'en va.

après tant de temps en prière,

j'ai vu dans un vacarme étrange

le temps que baisait la poussière

tomber couronné dans leur fange.

 

maintenant là, couché par terre,

sentir si loin chaque racine,

et m'entendre dire à mon père

combien j'aimais cette colline !

n’être rien si l'on ne se touche,

compter en cercles les années,

jeter un regard à la souche,

nous savoir déjà étrangers.

lourdement étalé dans l'herbe,

goûter à nouveau la rosée,

en méditant ces mots, ce verbe,

j'attends le feu, l'âtre à versets...

 

partir sans être regretté,

dans de sombres fumées épaisses,

s'enfuir avec pour seuls regrets

que ces visages sans tristesse.

Ah ! je n'ai rien à dire aux hommes,

et plus rien à dire aux hérauts,

pourtant à la vie et aux mômes

j'aurais bien laissé quelques mots.

vivre sans être nécessaire,

mais triompher même en automne,

monter aux cieux le goût du vert,

et rendre au bleu tout ce qu'il donne...

 

 

Sébastien Broucke

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13 novembre 2010 6 13 /11 /novembre /2010 18:30

Job

 

Bateau-copie-1.jpg

 

Bateau, je veux rentrer, qu'on me ramène au port.

Je vais avoir trente ans, je n'en ai pas envie,

Et comme disait Job en pleurant sur son sort,

Laissez-moi donc en paix, ôtez-moi de la vie.

 

Dans ma peine je rêve et rêve d'une chose,

De n'être jamais né pour naître jamais mort.

Je n'aurais pas connu, ni le bleu, ni le rose,

Ni l'appel du matin, ni la soie de son corps,

 

Mais j'aurais évité l'échouement de mon cœur,

Et ces rives sans sable où j'ai refait naufrage.

Car, que sont quelques joies pour tant d'atroces heures,

Tant d'années pour apprendre oublier un visage ?

 

N'étant jamais venu, j'errerais sans regret,

Je ne penserais pas, ni ne serais non plus,

J'attendrais bienheureux la plage où m'enfoncer,

Rien ne serait changé, mais je n'aurais rien vu ;

 

Rien au fond de ses yeux, rien au bord de sa lèvre,

Rien au bout de la nuit, rien au ciel de sa peau,

Rien du plus grand drapeau, de la plus belle fièvre,

Plantés dedans mon âme et poignards dans mon dos !

 

M'est resté du passé ces cendres qu'on ne quitte,

L'extase, l'euphorie, les voyages complices,

Feu les ravissements longtemps qui ressuscitent !

Goûter sans le pouvoir ce qui fut... Mes délices

 

Ne furent que fumées, tempêtes mes tourments,

Géante la misère à ce débordement.

Ah ! Resonger à elle, écueil en plein beau temps,

C'est mourir un peu plus et sombrer lentement...

 

 

Sébastien Broucke

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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 18:00

 

Le Verbe

 

Je voulais pas rentrer ce soir

J'étais ailleurs, près d'autres voix

J'allais négligeant le devoir

Voir d'autres murs, un autre toit...

 

Comme la mer, rompre une digue

Être enfin libre, être enfin moi

Rempli d'excuses, de fatigues

Dormir ailleurs et loin de toi...

 

Croire aux mensonges des gens seuls

Combattre l'âge et l'habitude

Trouver des joies dans leur linceul

M'offrir au cœur la solitude...

 

Oubliant mon bonheur sans ride

Courir le perdre à d'autres jeux

La tête et la mémoire vides

Étouffer d'être un homme heureux...

 

Et... j'eus ce cœur au bout d'un fil

Tout soupireux de me revoir

Qui recréa tremblant d'argile

Le mien sans s'en apercevoir...

 

Sans trêve il fallut que je vienne

Sur l'heure il fallut que j'écrive

Ta main bénie manque à la mienne

Aux vents les grands amours survivent !...

 

Penser qu'un jour tu pourrais n'être

Que la blessure d'une absence

M'offrir soudain pour morte lettre

Au souvenir de ta présence...

 

Panser la plaie de ce départ

Qu'un soir un jour m'infligerait

Perdre l'espoir de ton regard,

Tout redonner pour un baiser...

 

Songer que nous pourrions sans ombre

Errer sur nos anciens chemins

Désespérer de la pénombre

Aux soleils pleureurs des matins...

 

Porter toute une éternité

Le poids essuyé de nos larmes

Mourant de t'avoir offensée

Survivre appuyé contre une arme...

 

M'égarer sans y revenir

Au jardin des jeunes années

Hurler de ne pouvoir haïr

Cet homme en moi que tu aimais...

 

M'entendre honnir la terre entière

Et blasphémer contre ce ciel

Ayant permis que ma poussière

Se mêle à tes lèvres de miel…

 

Plutôt qu'aller pleurer trop tard

Sur le tombeau de notre amour

Plutôt qu'aller me perdre au phare

Du passé, jetée sans retour...

 

J'ai préféré rentrer ce soir

Sourire à deux des prochains jours

J'ai préféré fondre te voir,

Vivre à moitié serait trop lourd…

 

Mais si jamais revient l'orage

Je prie pour rester non coupable

De ruisseler sur ton visage

Des rides de peine ou de fables...

 

Devant tes yeux j'avoue je veux

Les rêves qu'ils ont derrière eux

Et sous les cieux sourds, noirs ou bleus

Vieillir et rester amoureux !…

 

 

Sébastien Broucke

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2 novembre 2010 2 02 /11 /novembre /2010 23:00

 

Ilule-2.jpg

 

Il est là. Surmonté d'un joli crépuscule,

Il a le corps petit, trop, presque ridicule.

Illogique, immobile, planant sur ses ridules,

Il comprend le ruisseau qui brode et affabule.

 

Illuminant le vert que la nuit dissimule,

Îlot qu'un ciel amant ce soir tintinnabule,

Il songe étonnamment à sa ronde pendule,

Il l'écoute et, crédule, agiote qu'il ulule.

 

Il est enraciné, à l'aise en sa cellule,

Il erre bienheureux dans un nid minuscule.

Illicite buisson que pas un dieu ne brûle,

Il sent que tout est grand, et même la virgule.

 

Illusoirement courts, ses bras raides ondulent,

Ils dansent aux parfums que les vents véhiculent,

Il s'éprend, il s'enivre, un vers d'air le stimule,

Il pulse dans ces flots ses divines formules.

 

Illimités en nombre, étoile qui opule,

Illogiques brillants que le noir éjacule,

Illusionnant son cœur sous vos points majuscules,

Il contemple son âme en vous qui déambule.

 

Illustres univers, immenses molécules,

Illisibles moments que les dieux accumulent,

Ilote des lueurs que vous avez granules,

Il visite, hauts cieux, vos moindres particules.

 

Il avance, illettré sur vos mers, somnambule,

Il est tout et né rien, il est l'accroc d'un pull,

Il est rempli de foi, ses prières pullulent,

Il est fou, il est roi, comme il est funambule.

 

Il défend feuille à feuille mai. S'il capitule,

Il se soumet au temps, aux ombres noctambules.

Il aime ces instants qui le désarticulent,

Hilare il s'embourgeonne, et l'azur gesticule.

 

Il est l'heure ! Oui... le jour s'allume au vestibule,

Illégitimement une autre aube bascule,

Il sent dedans son corps la sève qui circule,

Il est soleil déjà, la pénombre recule...

 

Illico, de ce dieu lançant ses tentacules,

Il s'éprend des rayons que le matin bouscule,

Il s'oublie, il se perd, sème ses follicules,

Il est... arbre en ce monde, et poète en sa bulle.

 

 

Sébastien Broucke

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23 octobre 2010 6 23 /10 /octobre /2010 20:00

 

La-femme-au-papillon.jpg

 

Riant le vent passait, tordu parlait aux arbres,

Indiscret j'écoutais ses clameurs que n'égalent

Nos liesses. Tu frémis. Le bois se fit de marbre.

Un cœur comprend toujours ce qui lui fera mal.


Je regardais au loin quand les branches se turent,

Soudain rien ne bougea. Surpris, le temps cessa,

Et l'absence des bruits ou celle des murmures,

Envahissant les lieux vint et les pétrifia.


La porte était fermée, rien ne pouvait sortir,

Mais rien ne demeura. Ton sourire d'abord

Avait fui ton visage, et ton regard, c'est pire,

Qui me fixait encore, interrogeait le Sort.


Le présent resté seul, les cieux n'avançant plus,

L'avenir nu, ton corps, les feuilles qui chutaient,

Tout s'immobilisa. Pantois comme un pendu,

Je scrutais les grains d'air que la frayeur figeait.


La nuit ne courrait plus claquer à la fenêtre,

Le soleil susurrait, ici cesse ta course...

Vivre depuis si peu et déjà ne plus être,

Ne pas voir l'océan, désapprendre la source !


Plus un cil à bouger, rien à pouvoir étreindre,

Ni l'horizon le soir, ni tes doigts le matin,

À suivre aucun chemin, point de berge à atteindre,

Espérer tout au plus toucher les nues demain...


Mirage, égarement, ne plus jamais dormir,

Mais rêver de partir comme un mort se mouvoir !

Ah ! que faisait sur moi cet insane sourire,

Et pourquoi tous ces gens pleurant dans ce couloir...


Descendre sans bouger, sans remuer s'enfuir,

Retourner à la terre, à la fumée se rendre,

Lorsque rien ne s'éteint, soudain ne rien voir luire,

Sauf le temps s'arrêter et le vent se suspendre !


Le froid vint. Et là, quand mes vers durent jaunir,

S'éteignirent leurs feux qui courtisaient l'automne,

Les arbres attendant, las, le roux reverdir,

Je pinçais dans ton cœur la corde où le glas sonne.


J'aurais trouvé tout bon, et la douleur festive,

Quand même on aurait du m'arracher chaque bras !

Essayer d'inspirer, d'avaler ma salive,

Mais rester affalé au secret de ce drap...


Cependant ne survint pas même le néant,

Plus de goût, de couleurs, rien d'autre à partager,

Qu'un même élan coupé, un petit trou béant

Pour verser dans ce monde où tout se doit d'aller.


Tombant sur tes genoux, digne comme une mère,

Tu revis les bonheurs que nous avions vécus,

Mais plantant dans ton cœur les traits de l'éphémère,

S'avancèrent tous ceux qui ne n'arriveraient plus.


Tu prias. Ta plainte enlacée de sanglots où

Les cieux lisaient l'amour que tu me portais trop,

Perla sans fin la larme au milieu de ta joue ;

Ton visage jamais ne reviendrait plus beau.


Serein, muet, inerte, aux débris de ta joie,

J'aurais sommé cet homme éveillant le hasard,

De descendre du ciel, de revenir pour toi,

Mais lorsque l'on s'en va, c'est sans voix que l'on part.


Attachés l'un à l'autre, épris dans sa tenaille,

Pourquoi deux cœurs soudés s'effraieraient de la Mort ?

T'ai-je dit que je t'aime avant que je m'en aille,

Je ne l'ai que pensé, voilà pourquoi, alors...


Dieu murmura "Pardon" quand les branches reprirent,

Sans trop nous regarder, sans trop faire attention,

Leur danse autour des troncs, leurs chemins pour fleurir,

Leurs doux balancements, leurs conversations.

 

 

Sébastien Broucke

 

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10 octobre 2010 7 10 /10 /octobre /2010 09:00

 

Chateau-copie-1.jpg

 

Alors que gémissait un arbre qui se cambre,

Lui n'entendait qu'un tronc qui balançait des branches,

Un grand morceau de bois planté dans un dimanche,

Où s'agitait ce soir un vent fort de septembre.

 

Il n'apercevait pas la cime qui pliait...

Penché vers ces pensées qui ne montaient vers rien,

Tourné vers quelque idée qui lui plaisait trop bien,

Tout paisible il paissait comme un boeuf paît au pré.

 

C'était la fin d'un jour, d'une sieste au jardin,

Content il semblait être, et ravi d'être seul,

Il ne portait alors ni drame ni linceul,

Et n'allait pas encor la tête entre les mains.

 

Stupide ou prétentieux il se berçait lui-même,

Croyant avoir tout dit il reposait ses doigts ;

Rien de neuf à verser quand on est sûr de soi,

Des vérités sans goût, du sang moins bleu que blême !

 

Le vent glissait des voix dans ses cheveux mi-longs,

A se sentir vivant, et sans doute immortel,

Rien n'avait plus de sens, la vie seule était belle,

L'insouciance régnait et courbait le gazon.

 

Il n'était pas coupable. Il dormait, juste, libre !

Il ne désirait rien ; un bout d'âme apaisée,

Un coin de solitude un moment arrêtée,

Du beau sans aucun prix, un brin d'herbe qui vibre...

 

Depuis longtemps déjà il n'allait amoureux

Que des lentes journées que rien ne chagrinait,

Depuis le grand amour qui l'avait déserté,

Il avait enterré le besoin d'être deux.

 

Il allait comme un fruit, aveugle autant que sourd,

Que porte une saison. Peu importait qu'il tombe,

Il se savait attendre, et l'heure où tout succombe,

Allait avoir le tact de venir sans tambour.

 

Redoublant ses efforts, tirant de tout son corps,

Le vent bandait son bras sur l'invisible corde,

Refusant de céder, refusant qu'on le torde,

Le faîte du grand pin se penchait plus encore... 

 

Tel un mât de misère affrontant la tempête,

Sans même inquiéter l'homme assoupi dans son parc,

Lentement et soudain, souriant tel un arc,

Le géant salua, il inclina la tête.

 

Ce lent mouvement lourd faisant un bruit d'abeille,

Le poète en dormant mit les mains aux oreilles,

Et mourut là, sans pouvoir rire à son réveil,

Du bout de bois planté au coeur de son sommeil.

 

 

Sébastien Broucke

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5 octobre 2010 2 05 /10 /octobre /2010 07:00

 

Roseau.jpg

 

Le soleil darde lentement,

Sur le bruit discret d’un ruisseau,

Mille rayons évanescents

Qui font briller les gouttes d’eau…

 

Adorant de divines dunes,

Où luisent d’invisibles fleurs,

Et la contemplant sable et brune,

Le temps se fige au bord des heures…

 

Las, comme lui, seul et brûlant,

L’amant jusqu’au bas de son dos,

Descendant crépusculement,

Caresse les grains de sa peau…

 

Devançant, sourds, la nuit qui vient,

Bien plus rapides, bien plus beaux,

Désirant sur lui ses deux mains,

Ses doigts, lents, retournent en haut…

 

Sa nuque est un monde, un trésor,

Sa chevelure est son drapeau,

La tendresse au cou de ce corps,

Il la découvre en ce chaos…

 

Sur l’oreiller que fait son torse,

Ses cheveux vont mezzotinto,

Mêlant la faiblesse à sa force,

Le bonheur brûle des flambeaux…

 

Univers éphémère, étonnant océan,

Où ne passe pas un vaisseau,

Sur tous ces flots même un géant,

Ne guiderait que des radeaux…

 

La glèbe en leurs yeux semble naître,

Qu’espoir mouvant que l’on écoute ;

Des murmures peut-être,

D’autres souffles sans doute…

 

Mais, dans les secrets de l’encore,

Au silence offrant ce seul mot,

Puisque leur amour est un port,

Chez elle il ancre son bateau…

 

Et là, de leur lit l’âme sort,

Leurs mains débordant de pinceaux,

Car au désir osé trop fort,

Le frisson résonne en écho…

 

De leurs bras alors ils s’évadent,

Leurs colonnes se font roseaux,

Et sous leurs yeux leurs dos cascadent,

La grâce en deux doux torrents beaux…

 

Bateau.jpg

 

Sébastien Broucke
Grelots d'outre-temps
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